Un mot sur les auteurs
En 1990 Peter Salovey et John Mayer (psychologues) ont proposé le concept de l’intelligence émotionnelle pour mieux identifier, comprendre et maitriser ses propres émotions et savoir composer avec les émotions des autres.
Il a fallu attendre le milieu des années 1990 pour que ce concept soit popularisé en 1995 par Daniel Goleman, psychologue américain.
Synthèse
Les 3 modèles :
Article
Avant-propos
Définition (Mayer & Salovey, 1997)
« L’intelligence émotionnelle désigne l’habileté à percevoir et à exprimer les émotions, à les intégrer pour faciliter la pensée, à comprendre et à raisonner avec les émotions, ainsi qu’à réguler les émotions chez soi et chez les autres ».
Principes
Le principe de l’intelligence émotionnelle se décline en trois concepts. Selon les approches le concept sera centré sur les émotions et l’intelligence seulement alors que d’autres intègreront des notions comme la motivation par exemple.
Les trois concepts
Modèle de Salovey et Mayer
Modèle de Goleman
Modèle de Bar-On
Modèle de Salovey et Mayer
Les auteurs de la théorie
Ces deux psychologues et universitaires américains sont à la source de la création de la théorie de l’intelligence émotionnelle. Dit « IE ». Pour eux chaque individu traite l’information avec une approche émotionnelle et cognitive. L’intelligence émotionnelle étant à l’intersection des deux.
Le modèle initial s’articule autour de 3 processus mentaux principaux.
- Evaluer et exprimer ses propres émotions et celles des autres.
- Etre en capacité de les gérer.
- Etre en capacité de les utiliser à bon escient pour faciliter les processus cognitifs.
- En 1997, les auteurs ont mis à jour leur concept en y apportant plus de précision quant à son articulation.
- Aujourd’hui le concept est organisé autour de 4 branches représentant chacune une catégorie de capacité.
Les quatre branches
- Perception et l’évaluation verbales et non verbales des émotions.
- Capacité d’intégration et d’assimilation des émotions pour faciliter et améliorer les processus cognitifs et perceptuels.
- Connaissance du domaine des émotions, fonctionnement, causes et effets.
- Gestion de ses propres émotions et de celles des autres.
Modèle de Goleman
Daniel Goleman, psychologue et journaliste scientifique pour le New York Times a écrit un ouvrage qui a popularisé le concept d’intelligence émotionnel en 1995.
Le modèle de Goleman développe quatre concepts principaux.
- La conscience de soi : C’est la capacité à comprendre ses émotions, à reconnaître leur influence à les utiliser pour guider nos décisions.
- La maîtrise de soi : Cela consiste à maîtriser ses émotions et impulsions et à s’adapter à l’évolution de la situation.
- La conscience sociale : C’est la capacité à détecter et à comprendre les émotions d’autrui et à y réagir.
- Gestion des relations : C’est la capacité à inspirer et à influencer les autres tout en favorisant leur développement et à gérer les conflits (Goleman, 1998).
Pour Goleman les compétences émotionnelles ne sont pas des talents innés. Ce sont des capacités apprises qui évoluent avec le temps et l’expérience.
Goleman insiste sur le fait que les compétences émotionnelles ont un impact positif sur la prise de décisions et les choix que les individus peuvent faire.
Il décline les compétences émotionnelles autour de 25 compétences qui s’articulent autour de 5 axes.
Les 5 axes principaux
- La conscience de soi et la capacité à comprendre ses émotions
- L’autorégulation ou la maîtrise de soi
- La motivation interne
- L’empathie
- Les aptitudes sociales
Pour Goleman ce premier axe principal consiste en la capacité pour chaque individu de savoir reconnaitre l’état émotionnel dans lequel il se trouve et de l’impact que cela peut avoir sur les relations avec les autres. Dans cette approche il intègre :
- L’auto-assurance
- L’auto-évaluation réaliste
- Un sens de l’humour auto-dérisoire qui n’a rien à voir avec le fait de se dévaloriser.
- La maîtrise de soi
Pour Goleman ce deuxième axe principal consiste en la capacité pour chaque individu de maitriser et contrôler ses humeurs selon les contextes et les situations. Dans cette partie il intègre :
- La fiabilité et l’intégrité
- L’acceptation de l’ambiguïté
- L’ouverture et le changement
- La motivation interne
Pour Goleman ce troisième axe principal consiste en la capacité pour chaque individu d’identifier ce qui est important dans la vie pour se réaliser. Il intègre dans cette partie :
- L’envie d’accomplissement
- L’optimisme à l’épreuve des échecs et un engagement organisationnel
L’empathie
Pour Goleman ce quatrième axe principal consiste en la capacité pour chaque individu de comprendre fonctionnement émotionnel des autres. Pour Goleman il s’agit d’une habileté à créer des liens avec les autres en tenant compte de leur comportement émotionnel. Dans cette catégorie il intègre :
- L’expertise dans le développement des compétences et des talents chez les autres
- La sensibilité interculturelle (capacité à s’adapter à d’autres cultures et environnements)
- Le service aux autres (clients)
- L’empathie c’est une aptitude à prendre en compte les états émotionnels des autres pour sentir ce qu’ils ressentent.
Les aptitudes sociales
Pour Goleman ce cinquième axe principal consiste en la capacité pour chaque individu de créer des liens avec les autres notamment dans le développement de réseaux ayant les mêmes centres d’intérêt. Dans ce qu’il appelle les compétences sociales il intègre :
- L’efficacité dans la conduite du changement
- Le pouvoir de persuasion
- La création d’expertise
- Le leadership des équipes
Les composantes de l’intelligence émotionnelle
1.Indépendantes :
Chaque IE apporte une contribution unique au groupe.
2.Interdépendantes :
Chaque IE est interconnectée avec les autres.
3.Hiérarchisées :
Les capacités d’intelligence émotionnelle se développent les unes vis à vis des autres dans un ordre cohérent.
Il ne peut y avoir de Maitrise de soi sans au préalable La Conscience de Soi.
Il ne peut y avoir de motivation sans Empathie, Maîtrise de Soi et Conscience de Soi.
Ces 4 habiletés sont importantes pour une bonne sociabilité.
Les 25 compétences émotionnelles
- Conscience émotionnelle : Identifier ses émotions et leurs effets sur les actions menées.
- Auto-évalutation précise : Connaitre ses forces et leurs limites.
- La confiance en soi : Conscience de l’estime de soi, de sa valeur et de son potentiel.
- Le contrôle de soi : Maitrise des émotions.
- La fiabilité : Ligne de conduite stable d’honnêteté, de probité et d’intégrité .
- La conscience professionnelle : Travail responsable et conforme aux attentes.
- L’adaptabilité : Capacité d’adaptation face aux changements.
- L’innovation : Ouvert aux nouvelles approches et processus et fonctionnement.
- L’exigence de la perfection : Orienté vers l’excellence.
- L’engagement: Capacité de tenir des objectifs.
- L’initiative: Prise de décisions adaptées non prévues.
- L’optimisme : Faire face aux difficultés en les surmontant.
- La compréhension des autres : Tenir compte des attentes et préoccupations des autres.
- La passion du service : Disponibilité pour répondre au besoin des autres.
- L’enrichissement des autres : Habileté à mettre en valeur les autres selon leurs capacités.
- L’exploitation de la diversité : Savoir tirer profit des différences pour en extraire le meilleur.
- La sensibilisation politique : Capacité à identifier les valeurs et jeux de pouvoir d’un groupe.
- L’influence : Savoir argumenter pour convaincre.
- La communication : Capacité d’exprimer des messages clairs et d’écouter.
- Le sens de la médiation : Habileté à gérer et résoudre les conflits.
- Le leadership : Capacité à entrainer les autres.
- La gestion des changements : Savoir entreprendre et gérer les changements.
- La construction des liens : Savoir créér du lien avec les autres.
- Le sens de la collaboration & de la coopération : Savoir travailler en équipe pour l’atteinte d’objectifs communs.
- La capacité de mobiliser une équipe: Habileté à fédérer autour de projets communs.
Modèle de Bar-On
Directeur de l’Institut des intelligences Appliquées du Danemark et expert-conseil auprès de diverses organisations en Israël.
Reuven Bar-On a créé le quotient émotionnel comme critère d’évaluation du « potentiel » d’efficacité plutôt que de l’efficacité elle-même.
Dans son modèle Bar-On propose une liste de capacités émotionnelles et sociales.
- Intelligence Intrapersonnelle : être conscient de soi
- Humeur Générale : se comprendre et s’exprimer
- Intelligence Interpersonnelle : être conscient des autres, les comprendre et créer des liens avec eux
- Gestion du Stress : faire face à des émotions fortes
- Adaptabilité : s’adapter au changement et régler des problèmes de nature sociale ou personnelle
Bar-On utilise le terme d’intelligence émotionnelle pour le distinguer de la notion d’intelligence cognitive.
Pour lui il s’agit bien d’habiletés, d’aptitudes et de compétences que chaque individu applique de manière efficiente dans sa vie.
En revanche Bar-On souligne que l’intelligence émotionnelle et l’intelligence cognitive se conjuguent parfaitement pour constituer une intelligence globale.
Cela détermine le potentiel de réussite d’une personne dans un environnement qui lui sera favorable et qu’elle aura choisi.
Il précise également que ces compétences émotionnelles peuvent être développées à travers la formation et les expériences de vie.
Elles ne sont donc pas figées et évoluent dans le temps au fur et à mesure du parcours de vie d’un individu.
Les freins à l’intelligence émotionnelle
Le Dr Travis Bradberry auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet a mis en lumière plusieurs comportements qui traduisent un faible niveau en Intelligence émotionnelle (ou QE).
Difficulté à identifier ses points sensibles
Les personnes qui ont du mal à identifier leurs points sensibles et donc leurs émotions auront des difficultés à maitriser leur comportement dans des situations complexes.
Elles ne pourront pas les anticiper pour les éviter. La connaissance de ces émotions sensibles permet d’éviter les personnes et situations toxiques.
Être dans la victimisation
Il est plus facile de rejeter la faute sur les autres que d’assumer ses propres responsabilités.
Même si des environnements défavorables voire néfastes vous poussent à prendre des décisions difficiles.
Il est préférable de les assumer pour mieux les maitriser en fonction de vos propres émotions plutôt que de les subir. Car à terme cela ne pourra qu’être pire.
Être dans le jugement hâtif et vindicatif
Le jugement à l’emporte pièce est plus facile que l’analyse en sortant de son ethnocentrisme.
Les individus avec une faible intelligence émotionnelle formalisent facilement une opinion en référence à leur propre halo enregistré et imprimé dans leur cerveau.
C’est une forme de fainéantise intellectuelle par manque de capacité à gérer ses émotions et se positionner en fonction de celles des autres.
Ces personnes auront une position affirmative en ne tenant compte que de leur vision des choses.
Leur incapacité à gérer leurs propres émotions pourra les mettre dans des états de colère improductifs par peur de ne pas obtenir ce qu’ils souhaitent ou gain de cause.
A l’inverse les personnes ayant l’aptitude à gérer leurs émotions sauront prendre du recul et balayer tous les possibles en tenant compte des attentes de l’autre avant de prendre une décision.
Être sensible au stress
L’IE dotent les individus d’une forte capacité à identifier et gérer les émotions.
Si ces aptitudes sont relativement faibles chez un individu il sera sujet à un stress régulier dès que des situations inhabituelles vont se présenter à lui.
Être susceptible
La susceptibilité fait également parti des émotions que l’on ressent lorsque l’on se sent visé par des offenses ou attaques diverses.
En avoir conscience permet de mieux la gérer et de relativiser les situations ou paroles négatives qui nous visent.
En ce sens l’autodérision est une habileté à entretenir ou développer pour y faire face. L’humour est une arme de défense très puissante lorsqu’elle est utilisée à bon escient.
Les gens à faible QE auront des difficultés à développer cette habilité et seront en réaction primaire ou binaire face à des attaques même limitées.
Le premier degré étant leur seule grille de lecture ils se vexeront facilement et en permanence. Cela aura pour effet de les couper des autres.
Ne jamais manifester sa colère
Savoir gérer sa colère ne signifie pas pour autant qu’il ne faille pas la manifester.
Face à certaines situations et personnes il est nécessaire de manifester sa colère. Le tout n’est qu’une question de dosage.
Les personnes à faible QE rencontreront des difficultés à doser cette émotion et auront tendance à l’exprimer de manière décalée et excessive.
A l’inverse elles ne l’expriment jamais au risque de la cumuler intérieurement et de générer ainsi une grande frustration qui peut devenir explosive et inappropriée au moment ou elle se produit.
Sentiment d’être incompris
Avoir le sentiment d’être incompris est une émotion difficile à vivre mais faut-il avoir conscience de cette situation et essayez de comprendre pourquoi.
Etre sur le même canal de communication des autres n’est pas toujours facile.
Les personnes à fort QE ont cette habilité à l’identifier et le rectifier alors que les personnes à faible QE ne le percevront pas et resteront persuadés que ce sont les autres qui n’essaient pas de les comprendre.
Difficultés à formaliser vos émotions
Savoir formaliser se émotions implique évidemment cette habilité à les identifier au préalable.
Mais sans champ lexical développé pour mettre des mots justes sur ses émotions ressenties on s’expose à de fortes incompréhensions de la part de ses interlocuteurs.
Etre rancunier
La rancœur est une émotion négative qui empêche de passer à autre chose, de tourner la page et donc d’avancer.
Elle prend beaucoup d’énergie et vous renvoie toujours en arrière. Elle vous limite dans votre capacité à vous projeter dans l’avenir pour construire quelque chose de meilleur et positif.
Elle vous limite dans les actions à mener et vous entraine dans une procrastination sans point d’accroche pour en sortir.
La rancœur vous maintient dans un état d’inconfort et de colère latente bloquant ainsi vos pensées positives qui vous permettraient de repartir sur de nouvelles bases.
Là aussi, savoir gérer cette émotion permet d’évoluer et de grandir.
Bloqué par ses échecs
Dans certaines sociétés l’échec est perçu comme définitif alors que d’autres les assimilent comme faisant parti de la vie.
Imaginez un sportif qui s’arrêterait de jouer en pleine partie parce qu’il a loupé une passe. Inimaginable. Au bout de 10 minutes plus aucuns joueurs ne joueraient.
Les personnes à fort QE ont parfaitement conscience de ce sentiment lié à l’échec et savent très bien le gérer sans pour autant le nier mais plutôt en essayant de ne pas le reproduire ou du moins d’en limiter les effets dans leurs actions futures.
Les personnes à faible QE auront des difficultés à gérer ce sentiment et auront tendance à ressasser en permanence leurs échecs voire à rester bloqué dessus. Elles seront ainsi frappé du syndrome de Pavlov.
Difficulté à s’affirmer
Le fait de ne pas savoir contrôler ses émotions notamment pour s’exprimer et créer du lien avec les autres est un facteur négatif pour s’affirmer.
Les personnes à fort QE ont cette capacité à s’adapter pour trouver les différents canaux de communication émotionnels des autres et donc de pouvoir faire passer leurs messages et intentions.
Cela les met dans des dispositions favorables pour s’affirmer dans le bon sens du terme. C’est-à-dire sans écraser les autres.
Cela ne signifie par pour autant qu’elles ne rencontreront pas de difficultés surtout face à des personnes à faible QE.
Mais là aussi, elles sauront identifier les personnes toxiques pour les éviter ou les contourner.
Cette habileté, cette vision leur permettra d’aller plus loin et d’une certaine manière de s’affirmer sans l’avis négatif des autres.
En résumé
L’intelligence émotionnelle n’est pas innée et tant mieux, cela signifie que l’on peut l’améliorer en la travaillant et ce sans limite.
Il suffit juste de savoir s’écouter et porter attention aux autres pour se simplifier la vie en triant le négatif du positif.
C’est un état d’esprit accessible à tout un chacun. Apprendre à mieux se connaitre et connaitre les autres à travers les émotions pour savoir avec qui évoluer ou pas.
Les travaux scientifiques ont démontré que le QE était le chainon manquant dans l’analyse du fonctionnement humain.
Même s’il le complète plus qu’il ne remplace le QI, il a mis en évidence la nécessité d’être pris en compte notamment dans le domaine professionnel.
Vidéo sur l’intelligence émotionnelle en entreprise de Bernard Flavien, conférencier, comédien et coach en développement personnel intervient à Grenoble Ecole de Management.
Vidéo de Daniel Goleman sur l’intelligence émotionnelle à la nuit de l’entreprise positive